Le Portail des Géants

Assis, seul, au bord d’un lac entouré d’arbres, Alexandre contemplait le sommet de la colline située sur sa gauche. Tout là-haut, la lune lui révélait le Portail des Géants, deux piliers soutenant un linteau de marbre couvert de gravures dans un langage que le garçon ne connaissait pas.

Au cours de la journée, il avait été attiré par les pierres à trois reprises, faisant leur tour et passant sous l’arche dans l’espoir de déchiffrer leurs messages cachés. Les deux colonnes étaient sculptées sur toute leur longueur et quasiment identiques. Celle de gauche se parait d’un soleil radieux entouré de dix-huit sphères ; sur l’autre, les globes étaient au nombre de dix-neuf. La base de chacune s’ornait d’un motif représentant une empreinte d’animal à quatre griffes, puis venait la silhouette de ce qui pouvait être un crabe, une araignée, ou encore une créature à trois têtes. Il était difficile d’imaginer quel était le sujet choisi par l’artiste.

Alexandre ramassa une pierre plate et effectua des ricochets à la surface du lac. Le Portail le hantait et il s’allongea dans l’herbe pour essayer de trouver l’indice qui lui manquait. Chaque pilier possédait également une protubérance orientée vers l’intérieur ; de loin, on aurait dit deux doigts tendus l’un vers l’autre. S’il fallait en croire la légende, le géant qui avait créé le Portail aurait écarté les bras pour saisir les deux excroissances, après quoi il aurait disparu.

Mais l’enfant était bien incapable de reproduire un tel geste. Il avait beau tendre les bras au maximum, il lui manquait encore près de deux pas pour atteindre l’autre saillie.

Le doute l’envahissait peu à peu. Était-il vraiment Iskandar ? Il avait cru qu’il lui suffirait de voir le Portail pour que celui-ci lui révèle ses secrets.

« Que dois-je faire ? demanda-t-il à la lune.

— Tout ce qui est en ton pouvoir », lui répondit une voix familière.

Se retournant brusquement, Alexandre aperçut Chiron qui descendait la colline.

« Tu es vivant ! » s’écria le garçon en bondissant sur ses pieds.

Il courut vers le magus, qui s’accroupit pour le prendre dans ses bras.

« Oui, comme tu vois. Et heureux d’être redevenu humain.

— Mais tu… Camiron est passé par-dessus bord pendant la tempête et je n’ai pas réussi à te localiser. Je te croyais mort.

— Il est parvenu à atteindre la côte et, ne sachant que faire, il est ensuite parti en direction du sud, où il a fini par atteindre une forêt. Il y avait là-bas des gens qui le connaissaient – ou plutôt, qui me connaissaient, moi – et qui avaient le pouvoir d’inverser la métamorphose. Cela m’a coupé l’envie de changer d’apparence.

— Pourquoi as-tu pris le risque de te transformer si près de la forêt de Gorgone ? »

Chiron lui fit un petit sourire moqueur et détourna le regard.

« Je ne l’ai pas fait sciemment, admit-il. J’avais peur, Alexandre, tout simplement. Les Macédonyens approchaient et Parménion avait décidé de s’engager dans la région la plus maléfique de toute l’Egéa. « Il haussa les épaules. » Je me suis endormi, mais mes rêves m’ont été dictés par la frayeur. Au moins Camiron pourrait-il échapper à mes ennemis… mais je n’aurais jamais imaginé qu’il puisse abandonner ma pierre magique et ainsi me condamner à conserver son apparence. Peut-être avait-il intuitivement compris que c’était là son unique chance d’avoir une vraie existence.

— Pauvre Camiron. Il était si heureux de se réveiller chaque matin en se rappelant ce qu’il avait fait la veille. »

Le magus s’assit à côté du garçon.

« Il n’aurait jamais pu survivre, Alexandre, expliqua-t-il. Les centaures sont incapables de se nourrir tant que leurs deux corps ne sont pas séparés. Il l’ignorait, mais il était presque mort de faim quand il a fini par arriver ici. Il ne pouvait vivre indépendamment de moi.

— Il me manquera, fit le jeune prince.

— À moi, non, l’assura Chiron. Mais revenons à ton problème. Qu’as-tu découvert au sujet de ce Portail ?

— Presque rien. Les gravures qui ornent les deux colonnes ne sont pas totalement identiques ; peut-être s’agit-il d’une simple erreur humaine… même si j’en doute. Les excroissances sont un genre de poignée mais, comme dans la légende, il faudrait être un géant pour les saisir toutes les deux en même temps.

— Et pourtant, ce sont elles qui constituent la clef de l’énigme. Le texte gravé sur le linteau est de l’akkadien, dérivé de l’ancien alphabet atlante, qui comprenait quarante-deux lettres. Les Akkadiens ont fait tomber ce total à vingt-neuf.

— Tu es capable de le lire ?

— Bien sûr.

— Que dit-il ?

— Rien qui présente le moindre intérêt pour nous. Il raconte comment les piliers ont été apportés jusqu’ici, en donnant le nom du magus responsable et du roi en l’honneur duquel le monument a été érigé, puis en précisant que cela a eu lieu mille ans après la fondation de l’empire akkadien. C’est tout.

— J’en espérais plus », grommela Alexandre, clairement déçu.

Chiron ne put s’empêcher de rire.

« Une liste d’instructions à suivre, par exemple ? Je ne pense pas qu’elles aient été nécessaires, en ce temps-là, le Portail était toujours ouvert.

— Dans ce cas, comment faisait-il pour générer la magie ?

— Je ne crois pas qu’il l’ait jamais fait.

— Quoi ? Tu veux dire qu’il m’est impossible de ramener l’Enchantement ?

— J’en ai bien peur.

— Mais alors, que puis-je faire ?

— Les portails – car il en existe un grand nombre – permettaient de se déplacer entre les nations, les mondes, et même les époques. Dans les terres du lointain Orient, on les nomme lung mei, ou Voies du Dragon. À l’ouest, ce sont les Portes des Rêves, tandis que les habitants des contrées glacées du Grand Nord les appellent les Sentiers des Dieux.

— En quoi cela m’aide-t-il, si je ne peux m’en servir pour faire renaître l’Enchantement ?

— Que fait le cavalier quand son cheval est trop faible pour rejoindre le point d’eau ?

— Il lui apporte à boire, répondit Alexandre.

— Exactement. Tu ne peux restaurer l’Enchantement en Egéa ; il ne te reste donc qu’à envoyer les créatures des bois dans un monde où l’Enchantement est encore puissant.

— Dans ce cas, je dois ouvrir le Portail ?

— Je pense que telle est ta destinée.

— Mais comment saurai-je où les expédier ?

— Je suis bien incapable de répondre à cette question », admit le magus en haussant les épaules.

Le garçon se leva et gravit lentement la colline. Chiron le suivit et ils examinèrent les piliers ensemble.

« Que représente cette partie ? demanda Alexandre en indiquant l’empreinte monstrueuse.

— Il s’agit d’une carte de Egéa. Tu vois, Sparte se trouve ici, et voici le golfe de Korynthos.

— J’ai compris ! Ce crabe est donc la Chalcidique, que vous appelez le Trident ! » Il passa au second pilier et se pencha sur les mêmes dessins. « Regarde ! Ici, le golfe est plus étroit et les trois extrémités du Trident se rejoignent. »

Revenant à la première colonne, il s’immobilisa soudain, interdit.

« Attends ! Le golfe de Korynthos a disparu ! Que se passe-t-il, Chiron ?

— Ils se modifient au fur et à mesure que tu les touches, souffla le magus. Le motif de droite n’a plus rien de l’Egéa, toutes les îles sont désormais reliées à la terre. »

Sous leurs yeux éberlués, les cartes se mirent à se transformer de plus en plus rapidement, comme si une main invisible les traçait au fusain sur la pierre.

Alexandre revint au premier pilier et posa le doigt sur une petite indentation située au centre du plan inférieur. Le défilement s’arrêta aussitôt. Sur l’autre colonne, il ralentit et finit lui aussi par cesser.

Chiron se pencha en arrière, les mains sur les hanches.

« Voici au moins une partie de la réponse, déclara-t-il. Nous savons désormais comment faire pour régler le Portail. L’une des cartes doit représenter le monde où nous nous trouvons et la seconde permet de déterminer la destination. Je ne crois pas qu’il s’agisse là d’un portail temporel. J’en ai déjà vu et ils sont bien plus massifs ; la plupart du temps, ils prennent la forme de cercles de pierres. Et pourtant, celui-ci est plus complexe que ceux que les Akkadiens utilisaient pour se rendre d’un bout à l’autre de leur empire. Peut-être s’agit-il de l’un des six légendaires portails des Atlantes, qui menaient à des univers alternatifs ?

— Où se trouvent les autres ?

— Tu en as déjà emprunté un, puisque c’est par lui que Philippos t’a amené jusqu’ici. J’en connais un loin vers l’est, mais ses piliers ont été fracassés par une tribu superstitieuse. Quant aux autres, je l’ignore.

Peut-être ont-ils été engloutis par l’océan, comme l’Atlantide… à moins qu’ils ne reposent sous les glaces, aux confins du monde.

— Comment puis-je ouvrir celui-ci ?

— Je n’en ai pas la moindre idée, reconnut Chiron en examinant les saillies rocheuses. Les gardiens possédaient les pierres de Sipstrassi, les joyaux du pouvoir. J’en détiens également plusieurs, mais elles se trouvent bien loin d’ici et ne nous seront donc d’aucune utilité. Par contre, une chose est certaine : ce Portail était autrefois aligné avec les autres, mais l’alignement a été rompu. »

Ils examinèrent le monument pendant une heure encore puis, abattu de fatigue, Alexandre s’allongea sous le linteau. Il rêva de Pella, du palais de son père et de Parménion. Le songe était chargé d’anxiété et de crainte, car une brume obscure flottait à la limite de son champ de vision et il ne parvenait pas à trouver le courage nécessaire pour la regarder en face. Elle restait là, immobile, sombre et menaçante.

Finalement, incapable d’en supporter davantage, le garçon se retourna brusquement… pour se retrouver face à son reflet, que lui renvoyait un miroir sans cadre matériel, entouré de volutes de fumée.

« Tu n’es pas moi, fit-il.

— Tu n’es pas moi », répéta son double d’une voix moqueuse.

L’image éclata de rire et des cornes de bouc noires apparurent à ses tempes.

« Tu ne peux ouvrir le Portail sans mon aide, le nargua l’Esprit du Chaos. Tu en es conscient, n’est-ce pas ?

— Oui, admit Alexandre.

— Que m’offres-tu en échange de mon assistance ?

— Rien.

— Rien ? Les créatures de l’Enchantement te réduiront en pièces si tu échoues.

— Parfaitement, rétorqua le garçon en se sentant soudain confiant. Toi seul peux me sauver.

— Pourquoi voudrais-tu que je le fasse ?

— Allons, il n’est pas nécessaire que je réponde à cette question. Que deviendrais-tu sans moi ?

— Je ne mourrais pas, il me faudrait juste attendre un nouvel hôte.

— Mais l’impatience te ronge, remarqua fort justement l’enfant.

— Ce n’est pas faux, concéda l’Esprit du Chaos. Alors, que m’offres-tu ?

— Nous ne conclurons aucun marché. Satisfais-toi du fait que nous retournerons dans notre monde pour y reprendre notre affrontement.

— Je finirai par te vaincre, tu sais, susurra le Dieu Noir, comme mon frère a terrassé Philippos. Ah, quand je pense au bonheur qui nous attend, Alexandre… car je te le ferai partager. Tu n’as pas à me haïr, je suis là pour exaucer tous tes désirs.

— En ce moment, je n’en ai qu’un seul : quitter cet endroit.

— Qu’il en soit ainsi. Tu as vu les piliers et les plans qui y sont tracés, mais regarde plus haut. Les motifs supérieurs sont en réalité des cartes stellaires, qu’il te faut aligner en même temps que celles du bas. Une fois l’alignement atteint, le Portail se mettra à luire. Pense que tu te trouves entre deux miroirs tournés à l’opposé de toi. Si tu les fais pivoter, il arrivera un moment où tu te refléteras parfaitement dans les deux. À ce moment, les deux portails en phase ne deviendront plus qu’un, et il sera alors possible de passer dans le second monde.

— Mais cela risque d’envoyer les créatures dans notre univers, et ce n’est pas ce que je veux. Là-bas, elles souffriraient autant qu’ici. Ce serait même pire, car ici, les humains les connaissent. En Grèce, tout le monde les craindrait et chercherait à les exterminer.

— Oh, mais elles existaient aussi chez toi, autrefois. D’où viennent vos légendes, à ton avis ? De toute façon, où qu’elles aillent, leur existence sera empreinte de désespoir. Telle est leur nature, car elles sont incomplètes. Les dieux d’antan les ont créées par plaisir ou pour des raisons qui ne regardaient qu’eux. Ce sont des jouets abandonnés, Alexandre. La guerre qu’elles ont livrée il y a bien longtemps était toute leur vie, et elles ont commencé à dépérir à partir du jour où elles l’ont emporté. Mais nous les aiderons, mon frère. Nous leur trouverons un monde où elles auront l’occasion de combattre de nouveau.

— Tu peux faire cela ?

— Nous le pouvons, tous les deux, lui répondit l’Esprit du Chaos. Ensemble, rien ne nous est impossible, ne l’oublie jamais. Et maintenant, commençons. »

Alexandre se réveilla. Chiron ronflait paisiblement à ses côtés. Le prince se leva et observa le pilier de gauche.

« Escalade-le », lui ordonna la voix intérieure.

Ce ne fut pas difficile, car les gravures offraient une multiplicité de prises. Le garçon grimpa jusqu’à atteindre une sphère entourée de globes plus petits.

« Touche la pierre centrale », lui dit l’Esprit du Chaos.

Alexandre s’exécuta et la carte stellaire se modifia comme l’avait fait celle de l’Egéa.

« Elle se réaligne, expliqua le Dieu Noir. Et maintenant, fais de même avec la seconde colonne. »

L’enfant obéit une fois encore aux instructions, mais il s’arrêta au moment de toucher la roche.

« Qu’y a-t-il, mon frère ?

— Comment puis-je te faire confiance ? s’interrogea Alexandre. Pour ce que j’en sais, tu pourrais envoyer les créatures de l’Enchantement dans un monde infernal.

— C’est vrai, oui. Mais tu es l’Élu, Iskandar. Tu ne les expédieras jamais dans un tel lieu de désolation.

— Je ne comprends pas.

— Ta venue a été prédite, jeune prince, le Portail t’attendait. Les alignements étaient déjà réglés en prévision de ton arrivée, comprends-tu ? Tu n’es qu’un instrument de la destinée. Le dernier homme à avoir franchi le Portail l’a sciemment déréglé derrière lui, et toi seul peux retrouver la bonne combinaison. »

Mais Alexandre ne bougea pas pour autant.

« Que puis-je faire de plus pour te convaincre ? voulut savoir l’Esprit du Chaos. Dis-le-moi. »

Le garçon ne répondit pas. Lentement, il tendit la main et toucha la sphère. La colonne se mit à vibrer et Alexandre faillit tomber. Il redescendit rapidement et s’écarta de quelques pas. Une étrange lueur naquit au cœur de la pierre grise et une odeur âcre de feuilles brûlées emplit l’air.

Chiron se réveilla et alla précipitamment rejoindre l’enfant.

« Tu as trouvé la solution de l’énigme ? demanda-t-il.

— Je crois, oui. »

Le Portail brillait désormais d’un éclat argenté, des flammes apparurent dans toutes les rainures formant les cartes et le texte. Les sphères s’embrasèrent elles aussi, tels deux soleils miniatures, et la colline se retrouva baignée de lumière.

L’air compris entre les deux piliers devint trouble et laissa apparaître une plaine délimitée par plusieurs montagnes et des bois lointains, le tout sous un soleil radieux. Alexandre avança, mais Chiron lui attrapa l’épaule.

« Non. Il n’est pas encore ouvert », fit le magus.

Les créatures de l’Enchantement apparurent à l’orée de la forêt. Alexandre se tourna vers elles. Elles avançaient lentement, comme hypnotisées par le Portail scintillant. Cela faisait des siècles qu’elles rêvaient de cet instant, et leur espoir venait enfin de se concrétiser. Elles formèrent un grand cercle à la base de la colline : centaures, dryades, nymphes, géants ailés, vores à peau sombre, reptiles, minotaures… tous approchaient sans bruit du monument.

Le soleil d’un autre monde baignait les traits des êtres de l’Enchantement et pas un d’eux n’osait faire le moindre bruit.

Alexandre avait la gorge sèche ; les espérances de toutes ces créatures étaient comme un poids terrible sur sa poitrine.

Fermant les yeux, il chercha mentalement Théna, qu’il trouva assise au cœur de la forêt. Il ressentit brièvement le chagrin qu’éprouvait la prêtresse, puis celle-ci se replia derrière un masque impénétrable qui cacha ses émotions.

« Que veux-tu de moi ? demanda-t-elle.

— Il faudrait que tu accomplisses un voyage pour moi », répondit-il.

Théna se sépara de son corps. Gardant les paupières résolument closes, Alexandre la regarda traverser le Portail luisant. Elle revint quelques instants plus tard.

« Ce monde n’est que sauvagerie et douleur », lui apprit-elle.

Une fois encore, le garçon escalada le pilier de droite pour aller toucher la sphère.

Le Portail changea encore de couleur pour prendre la teinte de l’or poli. La scène qui s’y trouvait représentée se modifia elle aussi, proposant aux individus présents un océan infini venant caresser une plage de sable blanc.

« Et là ? demanda Alexandre.

— Je n’ai pas besoin d’y aller, lui répondit l’esprit de Théna. Je sens l’Enchantement d’ici, il est pur et prend sa source dans la joie. »

Les chevaux de Parménion, Philippe et Attalus avançaient au pas dans les bois silencieux. La lune était haute dans le ciel et sa lumière argentée scintillait au contact des pierres et des cours d’eau, mais il n’y avait pas le moindre signe de vie alentour.

La voix de Théna retentit dans l’esprit de Parménion.

« Poursuivez en direction du sud jusqu’à atteindre une cascade, puis bifurquez vers l’ouest. »

Moins d’une heure plus tard, les trois compagnons émergèrent dans une clairière emplie de créatures de l’Enchantement : centaures, cyclopes, hommes et femmes ailés, dryades et autres faunes. Parménion mit pied à terre et s’inclina devant la déesse aux cheveux blancs. Le corps nu et éthéré de cette dernière luisait à la clarté de la lune, et pourtant le Spartiate ne ressentit pas le moindre désir charnel en sa présence. D’une beauté irréelle, elle semblait totalement hors d’atteinte pour les mortels.

« Bienvenue, Parménion, lui dit-elle. Ta route a été longue et périlleuse.

— Et pourtant, nous sommes arrivés, madame. Où est le garçon ?

— Il examine le Portail. Dis-moi comment mon fils est mort.

— En compagnie de ses amis. » Elle acquiesça en souriant.

« C’est bon de le savoir, fit-elle. Au moins avait-il encore une lueur de noblesse en lui.

— Et même davantage, je pense.

— En un millier d’années, il ne s’était jamais fait le moindre ami. Quelle qualité si particulière possèdes-tu donc ?

— Aucune, que je sache. »

La déesse se tourna vers Philippe.

« Je ne m’attendais pas à m’adresser un jour à quelqu’un ayant ton visage, reconnut-elle. Même maintenant, j’ai du mal à te regarder en face.

— Je ne suis pas Philippos.

— Je sais, oui. Tu t’es bien battu.

— Il était aisé de le tuer. Ayant toujours été invulnérable, il n’a jamais pris la peine d’apprendre à se défendre convenablement.

— Tu es roi dans ton monde ?

— Oui.

— Et apportes-tu terreur et désespoir à tes voisins, toi aussi ?

— Oui, avoua Philippe. Telle est la nature de la Grèce, madame. Nous sommes perpétuellement en guerre. Mais bientôt nous deviendrons une nation unie et nous cesserons de nous entre-tuer.

— Sous ton autorité, j’imagine ?

— Bien sûr.

— Rien ne changera donc jamais, commenta-t-elle avant de passer au dernier membre du trio. Et toi, Attalus, qu’as-tu appris de ta visite en ce royaume ?

— Rien que je ne sache déjà, répondit-il avec un haussement d’épaules.

— Le crois-tu vraiment ? Ne t’es-tu pas vu sous un jour différent ? »

L’ancien assassin se permit un bref sourire. « Je sais qui je suis et ce que je suis. Je ne me fais pas d’illusions.

— Mais tu as osé défier le Roi-Démon. Cela doit bien constituer une source de fierté pour toi, non ?

— Non, car j’ai été tout près de céder, et il n’y a pas de quoi en être fier.

— Tu te trompes, Attalus. Tu es arrivé ici rongé par la haine et la rancœur, et tu en laisseras une bonne partie derrière toi. N’est-ce pas exact ?

— Oui », admit-il.

La déesse revint à Parménion, qu’elle prit par le bras pour l’emmener à l’écart.

« Tu as trouvé l’amour en ce lieu, humain, lui dit-elle. Le laisseras-tu derrière toi ?

— Il le faut.

— Tu es toujours hanté par le remords, n’est-ce pas ?

— Oui. Je dois continuer de veiller sur Alexandre. Le démon l’habite toujours, comme c’était le cas pour Philippos. Il aura besoin d’un véritable ami, de quelqu’un qui l’aime.

— C’est vrai, concéda-t-elle avant de le regarder droit dans les yeux. Mais sais-tu qu’il finira par te tuer ?

— Tout le monde doit mourir un jour, et l’avenir n’est pas gravé dans le marbre.

— Le tien, si. Alexandre te tuera, Parménion. C’est écrit dans les étoiles et raconté par les murmures du vent. Tu ne pourras y échapper.

— Nous verrons bien, répondit-il, la gorge nouée.

— Tu es un homme bon et je te donne ma bénédiction, poursuivit-elle après un silence. Elle n’a plus guère de pouvoir, désormais, mais elle est toujours préférable à une malédiction.

— En effet. L’avenir de chacun d’entre nous est-il déjà écrit ?

— Non, seulement le tien et celui d’Alexandre. Mais il est désormais temps d’utiliser le Portail et de quitter ce royaume torturé. Viens nous dire adieu. »

Parménion se tenait à côté de Philippe, au centre de la foule silencieuse attendant devant le Portail. Au-dessus d’eux, l’astre de la nuit brillait de tous ses feux et les étoiles scintillaient telles des pierres précieuses sur une plage de sable noir. Mais le monument leur montrait une colline baignée de soleil.

« Le magus ! s’écria Philippe en montrant Chiron du doigt. C’est lui qui m’a ensorcelé !

— Je ne pense pas, sire. Chiron fait partie de ce monde.

— Si je vois encore d’autres jumeaux, je vais finir par devenir fou », bougonna le roi.

Alexandre se plaça entre les piliers. Touchant l’excroissance de droite, il tendit la main vers celle de gauche. Au bout de quelques secondes, il rejeta la tête en arrière et des volutes de fumée noire jaillirent de sa bouche et de ses narines. Collant à son corps, elles longèrent sa poitrine et son bras levé avant de constituer un second Alexandre cornu aux yeux jaunes, sosie difforme et grotesque de l’original. Tenant la main du garçon, l’Esprit du Chaos se saisit de l’autre saillie rocheuse.

À cet instant, un éclair relia les deux colonnes. Alexandre fut plaqué au sol, l’Esprit du Chaos rejeté dans les airs.

« Le collier ! hurla Théna dans l’esprit de Parménion. Agrafe-le autour du cou de l’enfant ! »

Parménion s’agenouilla à côté du prince inconscient. Du coin de l’œil, il vit l’entité de fumée plonger vers eux. Glissant le collier autour du cou d’Alexandre, il attacha le fermoir. La brume noire recouvrit le garçon, mais une brise subite la dispersa. L’enfant reprit connaissance.

« Le Portail est-il ouvert ?

— Oui », lui répondit Parménion après avoir vérifié.

Le premier centaure s’engageait déjà entre les piliers.

Alexandre se leva difficilement.

« Je ne sens plus la présence du Dieu Noir, souffla-t-il.

— Il t’a quitté, lui expliqua Parménion. Tu portes un puissant collier magique, et nulle malice ne pourra entrer en toi tant que tu le garderas. »

Philippe vint les rejoindre et s’accroupit à côté d’eux.

« Je suis fier de toi, mon fils », dit-il en lui tendant les bras.

Alexandre se pressa contre lui et Philippe se leva en serrant son héritier contre sa poitrine.

Parménion poussa un long soupir. Les créatures de l’Enchantement passaient lentement par le Portail pour se rendre dans leur nouvel univers.

« Quoi que l’avenir te réserve, tu pourras être fier de ce jour, Parménion, lui dit la déesse.

— Je le suis, madame. »

Sur un dernier sourire, elle aussi franchit la porte entre les mondes. Il ne restait plus que Brontès et Chiron. Ce dernier tendit la main au Spartiate.

« Je regrette d’avoir manqué la plus grande partie de votre voyage et de n’avoir guère pu vous aider, l’enfant et toi, s’excusa-t-il.

— Tu en as fait assez, l’assura Parménion. Tu nous as sauvés des vores le jour où nous nous sommes rencontrés et, sous les traits de Camiron, tu as emmené Alexandre jusqu’à la forêt de Gorgone. Que comptes-tu faire, désormais ?

— J’ai l’intention de voir ce que ce nouveau monde a à offrir. Mais il existe de nombreux portails, Parménion, et j’ai la sensation que nous nous reverrons.

— Ce sera avec plaisir. »

Chiron dit au revoir à Alexandre et Philippe tandis que Brontès approchait du général.

« Je ne t’oublierai pas, humain, lui assura le minotaure.

— Moi non plus.

— Tu as offert à mon frère une chance de rédemption, et je crois qu’il l’a saisie. Je t’en serai éternellement reconnaissant. Puissent les dieux marcher à tes côtés, Parménion.

— Et aux tiens », répondit le Spartiate alors que Brontès disparaissait à son tour.

Une fois l’homme-taureau parti, le Portail se remit à luire. Les piliers reprirent l’aspect de la pierre glacée et la scène un instant entrevue s’évanouit à tout jamais.

« Et maintenant, strategos ? » demanda Attalus.

Parménion haussa les épaules, il se sentait vidé de son énergie. Se dirigeant vers un arbre proche, il s’assit en s’adossant contre son tronc. En l’espace de quelques jours, il avait traversé un monde étrange de part en part, livré une terrible bataille et connu, ne serait-ce que brièvement, la vie d’un roi. La fatigue qu’il éprouvait était autant morale que physique.

Il reconnut le pas discret de Théna et sourit en la voyant s’asseoir près de lui.

« Et maintenant ? fit-il, reprenant à son compte la question d’Attalus.

— Nous attendons Aristote, lui dit-elle. As-tu apprécié le fait d’être roi ?

— Oui, avoua-t-il. J’ai retrouvé la femme que j’aimais… Dérae…»

Il poussa un nouveau soupir et sentit les larmes monter. S’obligeant à penser à autre chose, il détourna le regard.

« Tu pourrais rester, murmura la prêtresse.

— Non. Ma destinée me porte au-delà de ce monde. Je dois demeurer auprès d’Alexandre. Et vous, qu’allez-vous faire ?

— Je vais retourner à mon temple. Je suis une guérisseuse, et nombreux sont ceux qui ont besoin de mes talents.

— Vous avez l’air triste, madame, mais vous ne devriez pas l’être, la consola-t-il en lui prenant la main.

— L’existence est emplie de peines, reconnut-elle, mais c’est la vie. Tu es un homme bon. J’espère que tu trouveras le bonheur. »

Sur ces mots, elle se leva, descendit la colline et s’enfonça entre les arbres. Aussitôt, elle entendit la voix d’Aristote, qui résonnait dans son esprit comme si elle provenait de très loin.

« Les créatures ont-elles franchi le Portail ? voulut-il savoir.

— Oui.

— Jusqu’à la dernière ?

— Oui, ton jumeau y compris.

— Dans ce cas, aide-moi à me matérialiser là où tu te trouves.

— Comment ?

— Pense à moi et concentre-toi sur ma voix. La pierre de Sipstrassi fera le reste. »

Dérae sentit que quelque chose tirait son âme et il lui fallut résister pour ne pas être arrachée de force à son corps. Elle poussa un cri, mais la brusque douleur se dissipa aussi rapidement qu’elle était apparue et une silhouette de brume se forma devant elle, prenant peu à peu les traits d’Aristote. Le magus chancela et tomba à genoux, plantant les doigts dans le sol. « Quel voyage pénible ! admit-il. Merci, Dérae.

— Renvoie-moi chez moi, répondit-elle doucement. Sous ma véritable apparence.

— Tu as tout de même l’intention de rester jeune, non ? demanda Aristote en se levant.

— Non, répondit Théna-Dérae. Je veux redevenir celle que j’étais. »

Il secoua la tête et leva la main : une pierre dorée luisait entre son pouce et son index. Les cheveux bruns de la prêtresse reprirent une teinte argentée parsemée de reflets roux passés et son épiderme se creusa tandis que ses yeux aveugles retrouvaient leur aspect laiteux.

« Comment peux-tu vouloir cela ? demanda-t-il, incrédule.

— Je n’ai pas l’intention de vivre dans la peau d’une autre, expliqua-t-elle. Et maintenant, renvoie-moi au temple.

— Tu as fait tes adieux ?

— Dans la mesure du possible. »

De nouveau, la pierre magique s’embrasa et une aura lumineuse recouvrit la prêtresse. Quand elle se dissipa, Dérae avait disparu.

Cela fait, le magus alla rejoindre les Macédoniens en haut de la colline.

« Chiron ! s’exclama Alexandre. Tu es de retour !

— Oui. Je suis venu vous ramener à la maison.

— Duquel s’agit-il ? demanda Philippe d’un ton égal.

— À mon avis, d’Aristote, répondit Parménion avec un large sourire.

— En es-tu sûr ?

— Qu’en penses-tu, Attalus ?

— Je suis d’accord. C’est bien Aristote, sire.

— Parfait, décida Philippe en inspirant profondément. Fils de putain ! »

Fou de rage, il avança vers le magus, les yeux lançant des éclairs. Surpris et inquiet, Aristote recula précipitamment.

« Je n’avais pas le choix, sire, tenta-t-il de se justifier.

— Pourquoi m’as-tu volé mes souvenirs ?

— Ce n’est pas facile à expliquer, mais je veux bien essayer si vous m’en laissez la possibilité.

— Pour ma part, quelques éclaircissements ne me déplairaient pas », chuchota Parménion.

Philippe croisa les bras et fusilla Aristote du regard.

« Je t’écoute, magus, et ton histoire a intérêt à être passionnante. »

L’homme à la barbe grise s’assit et les autres formèrent un demi-cercle face à lui.

« Je me nomme Aristote… commença-t-il.

— Nous le savons déjà, bon sang ! s’emporta Philippe. C’est la suite qui nous intéresse ! »

Le magus leva la main pour réclamer le silence.

« Je vais y arriver, sire, mais à mon rythme, si cela ne vous dérange pas. On m’appelle aujourd’hui Aristote, mais j’étais autrefois Chiron, et je vivais alors dans cette dimension, en compagnie du peuple de l’Enchantement. C’est ici que j’ai rencontré Parménion, Attalus et Casque, le guerrier qui avait perdu la mémoire, ici encore que j’ai pour la première fois vu Iskandar, l’Enfant Sacré de la légende. Et, comme vous venez de le constater, j’ai quitté ce monde par le Portail, en suivant l’exode des fils des titans. Pour vous, cela s’est produit il y a quelques minutes seulement. Mais pour moi, quatre siècles se sont écoulés depuis mon départ.

— Qu’est-il arrivé entre-temps ? voulut savoir Parménion.

— J’ai exploré de nombreuses contrées au fil des siècles. J’ai découvert d’autres portails menant à des mondes inconnus et mes voyages m’ont conduit au fin fond de l’univers. Mais la compagnie des humains me manquait et je me suis donc rendu en Asie et en Grèce. Là, j’ai une nouvelle fois entendu parler de Parménion. C’est à ce moment que j’ai compris que mon périple m’avait ramené dans le temps, car j’étais arrivé avant que notre ami ne parte pour l’Egéa. Cela m’a posé un terrible problème : devais-je interférer ? L’avais-je déjà fait ? Bien sûr que oui, car je me souvenais qu’en rencontrant Chiron, Parménion lui avait appris que c’était un sorcier d’un autre monde qui l’avait envoyé ici. Selon lui, cet homme était mon sosie. Je me suis rendu compte que j’étais pris dans un terrible engrenage. Il me fallait recréer à la perfection les événements auxquels j’avais assisté, sous peine de risquer de modifier le passé… et peut-être de me détruire moi-même. Ah, quel paradoxe, mes amis ! J’ai donc envoyé Parménion et Attalus en Egéa, puis je suis venu vous trouver, sire. J’ignorais ce qui allait vous arriver à tous, car les souvenirs que j’ai de cette époque sont confus, en raison du temps que j’ai passé sous la forme de Camiron. Comprenez-vous le dilemme qui était le mien ? Je ne pouvais rien vous dire, pour la bonne et simple raison que je ne savais rien lorsque je vous ai rencontrés. Je mourais d’envie de vous aider, mais cela m’était interdit, car certaines lois sont immuables. Il est impossible d’utiliser un portail pour se rendre dans une époque ou un lieu où l’on existe déjà, car nul ne peut se rencontrer. Je ne pouvais donc qu’attendre en espérant que les événements reprendraient le cours qui avait été le leur de par le passé.

— Un instant, j’ai cru que j’allais comprendre ce que tu disais, se plaignit Philippe. Mais trouver un sens à tes paroles est plus ardu que de pêcher une truite à mains nues.

— Je suis conscient du problème. De votre point de vue, ces aventures étaient inédites mais, pour moi, elles faisaient partie de mon histoire ; elles s’étaient déjà produites. Et je ne pouvais compter que sur ce que je connaissais en temps que Chiron. Ce dernier savait juste que Philippos s’était fait tuer par un inconnu du nom de Casque, qui était lui-même roi de Macédoine dans un autre monde. Chiron – autrement dit moi-même – savait également que ce monarque avait perdu la mémoire. Je me suis donc contenté de recréer les circonstances existant à mon époque.

— C’est bien ce que je disais ! s’énerva Philippe. Au moment où je commence à comprendre, tout m’échappe. Mais réponds à cette question : qui a eu l’idée de m’enlever et de me voler mes souvenirs ?

— Tout n’est qu’un cercle, sire. Il n’existe donc ni commencement ni fin. Personne n’est responsable.

— Personne n’est… écoute-moi bien, magus : je suis roi, et un roi a toujours besoin de trouver un coupable. Ainsi va la vie. Tu t’es présenté à l’entrée de mon palais et tu m’as capturé sans m’en demander la permission. Donne-moi une bonne raison de ne pas te décapiter sur-le-champ. »

Aristote écarta les bras en souriant.

« Que voulez-vous que je vous dise, sire… sinon que, si vous veniez à essayer, je vous transformerais en lézard et vous écraserais. »

Philippe réfléchit un instant puis se tourna vers Parménion.

« Cela me paraît une raison valable, commenta-t-il.

— Je suis d’accord avec vous, sire, renchérit le Spartiate.

— Tu me plais, magus, déclara le roi. Mais tu as une dette envers moi. Comment comptes-tu t’en acquitter ?

— Avez-vous une proposition à me faire, sire ?

— Reviens avec nous à Pella et sois le précepteur de mon fils. »

Aristote éclata de rire.

« J’allais vous prier de me faire cet honneur, dit-il. J’accepte donc ma pénitence avec joie.

— Bien ! Maintenant que tout est réglé, ramène-nous à Pella.

— Parménion n’a pas encore dit adieu à sa reine, remarqua le magus en redevenant grave. Elle attend au pied de la colline. »

Le cœur lourd, Parménion descendit la petite butte. Il trouva Dérae assise sur un arbre mort, elle se leva en le voyant approcher.

« Tu serais parti sans me dire au revoir ? lui demanda-t-elle.

— Oui. C’était lâche de ma part, je sais, mais je me sentais incapable de te regarder en face. As-tu discuté avec Léonidas ?

— Il m’a tout appris. Suis-je comme elle ?

— En tout point.

— Alors, ce n’est pas moi que tu as aimée, fit-elle tristement.

— Si, l’assura-t-il. Au début, je l’avoue, ce n’était qu’une image, un souvenir. Mais c’est à toi et à personne d’autre que j’ai fait l’amour. C’est toi que j’aime.

— Et pourtant, tu ne peux rester ?

— Non. Je dois veiller sur Alexandre. Tel est mon devoir… ma vie… Me pardonneras-tu ? »

Hochant la tête, elle le serra contre elle et l’embrassa doucement sur la joue avant de s’écarter.

« Va, lui dit-elle. Pars sans perdre de temps. Je sais que tu me reviendras. Je connais ton secret, Parménion. J’ai appris pourquoi tu devais suivre Alexandre. Mais ta destinée est ici et elle finira par te reconduire vers moi. Et ce jour-là, je t’attendrai telle que tu me vois. Je serai là.

— Je ne peux te le promettre, même si je le souhaite de tout mon cœur.

— Tu n’as pas à le faire. La nuit dernière, j’ai fait un rêve. Un sorcier à barbe grise m’est apparu, qui m’a dit de me trouver ici ce soir. Il m’a prévenue que tu repartirais vers ton monde, mais il a ajouté qu’il ferait tout son possible pour te renvoyer vers moi. J’attendrai. »

Parménion fut incapable de lui répondre. Reculant de quelques pas, il fit volte-face et gravit la colline.

Aristote l’attendait et leva les mains au ciel en le voyant arriver.

Le Portail se mit à luire une fois de plus…

 

L'Esprit du Chaos
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